Session plénière de mai 2011: politique générale

Publié le par Groupe des élus UDB

Herri 

 

Session du Conseil régional de Bretagne administrative

Les 24-25 mai 2011

 

Intervention de politique générale de Herri Gourmelen

Président du Groupe UDB – Autonomie et Ecologie

 

 

 

 

Monsieur le Président, chers collègues,

 

Lors du débat de politique générale, en ouverture de la session du mois de février, nous disions notre solidarité avec les peuples tunisien et égyptien dans leur si courageuse et dangereuse lutte pour la liberté et la justice. Depuis lors, le mouvement s'est étendu à l'ensemble du monde arabe et berbère où des dictateurs, dans des pays comme la Libye et la Syrie, font la guerre à leurs peuples, au prix de milliers de vies d'hommes, de femmes et d'enfants innocents. Au-delà de l'affirmation de notre solidarité avec ces peuples, nous devons nous interroger sur les façons concrètes de les aider car, n'en doutons pas, une partie de l'avenir de l'Europe se joue en ce moment en Afrique du nord et au Moyen Orient.

 

Nous sommes conscients que la Région de Bretagne administrative a des moyens hélas très limités et qu'elle ne peut multiplier les jumelages bilatéraux. Il faudra donc trouver d'autres chemins. Sans doute convient-il de faire appel à l'exceptionnel réseau breton d'organisations de solidarité qui peut être sollicité notamment dans le cadre de la plateforme ABCIS (Acteurs Bretons de la Coopération et de la Solidarité Internationale) que notre collègue Kristian Guyonvarc'h a créée en 2005 et qui demeure un outil actif de mutualisation. Par ailleurs, Monsieur le Président, vous présidez aujourd'hui aux destinées de la Conférence des Régions Périphériques Maritimes, la plus puissante association de régions en Europe. Or, la CRPM, qui compte plusieurs régions partenaires au Maroc, en Tunisie et au Liban, dispose avec sa Commission géographique interméditerranéenne d'un outil immédiatement opérationnel pour concevoir et mettre en oeuvre des coopérations interrégionales en matière d'appui à la gouvernance. Notre groupe souhaite, Monsieur le Président, que le Président de la Région Bretagne et de la CRPM que vous êtes mette en action ces différents outils afin que la Bretagne puisse apporter sa contribution à la stabilisation des jeunes démocraties d'Afrique du nord, étape indispensable pour un développement économique et social qui permettra aux jeunes Nord-Africains de croire qu'ils peuvent se construire un avenir dans leur pays. Une fois encore, au risque de nous répéter, cet avenir-là est aussi le nôtre.

 

La solidarité internationale, parce qu'elle ne peut pas se découper en tranches, réside dans lavolonté de changer un ordre du monde injuste – ou pour mieux dire un désordre qui frappe les plus pauvres, pays et individus. Cela nous concerne directement en tant qu'élus. Chaque élection, locale, régionale, nationale, européenne, est l'occasion de dire le mode de développement et la solidarité sociale que nous voulons. Aucune des décisions que nous prenons ici n'est neutre: que ce soit en matière d'agriculture, de pêche, d'énergie, de formation, de culture, toutes ont un impact sur l'ensemble de la chaîne humaine, du local à l'universel. Et ce n'est pas la catastrophe nucléaire de Fukushima qui nous démentira.

 

En France, deux échéances majeures nous attendent en 2012, les élections présidentielle et législative. Nous les aborderons dans l'esprit que je viens de définir et avec en mémoire ce que nous disions le lendemain de l'accession de la gauche au pouvoir en 1981, événement largement célébré récemment.

 

Que disions-nous ? Que le formidable slogan « changer la vie » devait rapidement trouver des traductions concrètes, et d'abord dans l'amélioration des conditions de travail et les salaires, que l'emploi restait une priorité majeure de la Bretagne, que Plogoff ne devait pas se faire et ne se ferait pas, que la langue bretonne devait enfin être reconnue, que la France ne pouvait faire l'économie d'une authentique décentralisation, reposant non pas sur le département mais sur la Région. Je ne parlerai que des sujets qui concernent directement notre institution régionale aujourd'hui, la nécessaire mutation de notre agriculture et la question énergétique avec les emplois qui y sont liés, l'identité bretonne et la situation du breton et du gallo, la décentralisation et l'organisation territoriale.

 

A Plogoff, la détermination des Bretons a été telle que la sagesse a prévalu. L'union nouée à cette occasion entre identité bretonne et écologie n'a cessé de se développer depuis. Lors de la présentation du Pacte électrique breton, vous avez dit, Monsieur le Président, vouloir « tourner la page de Plogoff ». C'est à dire du nucléaire, si nous avons bien compris ? Contrairement donc à Jacques Le Guen qui déclarait, début avril, que « le choix du nucléaire a permis à la France de devenir indépendante en matière énergétique », oubliant que le nucléaire représente moins de 17% de l'énergie consommée en France. Si nous pouvons nous rejoindre, Monsieur le Président, sur le nucléaire, notre désaccord de fond persiste s'agissant du projet de centrale électrique au gaz que d' aucuns qualifient déjà de baladeuse. Désaccord d'autant plus justifié que la profusion de centrales électriques à gaz en France (une quarantaine aujourd'hui) apparaît de plus en plus clairement comme le complément des EPR. Accepter les unes, c'est accepter les autres.

 

Nous sommes également dubitatifs et même, disons le carrément, sceptiques quant à la «  Nouvelle alliance pour l' Agriculture en Bretagne ». Il ne nous semble pas en effet que le soutien affiché à tous les types d'agriculture, conventionnelle, autrement dit productiviste, durable, bio soit la réponse attendue en termes d'emplois, de revenus, d'environnement, de développement rural. Autant sur ce sujet que sur le «  Pacte électrique breton », vous dites, Monsieur le Président, être en concordance avec les objectifs de l' Etat. Le préfet Cadot doit se dire: c'est sans doute ça le nouvel esprit Celib ! Pour notre part, nous ne sommes pas du tout convaincus que ce régionalisme de consensus soit de nature à apporter les réponses adaptées à la situation de notre pays. Nous sommes au contraire convaincus que la revendication de l'autonomie régionale – telle que nous la définissions dans notre intervention d'avril 2010, est plus que jamais d'actualité.

 

D'ailleurs vous présentez des voeux qui confortent notre analyse s'agissant de la reconnaissance des langues régionales ou de la maritimité de la Bretagne et nous ne sommes pas loin de penser que vous partagez largement notre critique de la réforme des collectivités voulue par Nicolas Sarkozy. Concernant l'enseignement de nos langues, après le ballon d'essai provocateur du ministre de l'Education nationale voulant supprimer le Capes spécifique – 12 postes pour cinq langues ! c'est le Conseil constitutionnel qui répond aux associations de défense du bilinguisme en Alsace-Lorraine que l'article 75-1 stipulant que « les langues régionales appartiennent au patrimoine de la France » « n'institue pas un droit ou une liberté que la Constitution garantit ». Et puisque j'évoquais 1981, d' aucuns parmi nous se souviendront du rapport Giordan préconisant l'offre généralisée en matière d'enseignement des langues minorisées... J'ose espérer que notre Assemblée sera unanime à réclamer ce droit ainsi que le transfert en sa faveur de la compétence de politique linguistique. Deux mesures qui vont de pair.

 

Nous avons, Monsieur le Président, lu et approuvé votre réaction indignée face à ce que vous avez appelé « un torpillage démontrant l'absence totale d'ambition maritime pour notre pays et consistant à dépouiller la Bretagne de ses responsabilités maritimes ». En effet, aux menaces initialement contenues dans le projet de carte des formations de nos lycées maritimes est venue s'ajouter la décision abracadabrantesque de diviser les eaux territoriales bretonnes en trois secteurs et d'en confier la gestion au préfet des pseudo Pays de Loire. Nous appuierons toutes les démarches que vous engagerez pour obtenir l'annulation d'une mesure aussi opposée aux intérêts bretons. Une mesure absurde révélatrice à notre sens de ce nouveau caporalisme d'état aux antipodes d'une décentralisation pourtant plus que jamais nécessaire. Gaston Defferre, régionaliste convaincu, que j'ai eu l'occasion de rencontrer naguère, m'avait assuré que la droite revenant au pouvoir ne pourrait remettre en cause la décentralisation. Sur le long terme, sans doute pas, car le carcan centralisateur n'est pas tenable dans une société moderne complexe. A court terme, on peut néanmoins assister à ce qui est une véritable régression démocratique. Ce serait le cas avec la mise en oeuvre de la réforme des collectivités locales concoctée à l' Elysée et refusée par une grande majorité d' élus, y compris de droite.

 

La menace de démantèlement maritime de la Bretagne n'est que la conséquence de son démantèlement tout court. La torpille la plus meurtrière pour notre pays est en effet la séparation de la Loire-Atlantique de l'ensemble breton. Pour nous en tenir au seul domaine de l'économie et pour ne prendre que les exemples les plus récents ayant trait à la mer, le coût de la division administrative pour la Bretagne c'est la perte du siège de l'Agence européenne de sécurité maritime à cause d'une rivalité Nantes-Brest jamais arbitrée par une Région divisée, c'est une alliance Saint-Nazaire/Le Havre contre l'alliance Brest/Lorient dans le développement industriel des éoliennes off-shore. Il eût été assurément bon que ,comme nous le demandons, le Grand Port Maritime de Nantes/Saint-Nazaire participe à la Conférence Régionale de Stratégie Portuaire. Il y a certes un contre exemple mais qui ne fait que confirmer l'analyse, c'est celui de la coordination Axe Mer Ouest (AMO) regroupant 1500 chercheurs et ingénieurs des établissements de recherche marine de Brest, Rennes et Nantes.

 

Le temps des voeux consensuels qui font du sur place et des groupes de travail dont on vote le principe mais qu'on ne réunit pas – je fais référence à notre vote unanime de juin 2010 sur la création d'un groupe de travail sur la réunification! ce temps-là est révolu. Chers collègues, je vous demande de mettre votre action en conformité avec votre vote et de participer à la manifestation du 18 juin à Nantes pour demander que la question de la réunification soit réglée de façon démocratique, c'est à dire sans donner de pouvoir de blocage au Conseil régional des Pays de Loire et aux autre départements de cette région factice.

 

Je vous remercie.

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